Depuis l’extinction partielle de l’éclairage public à Bordeaux, un débat émerge : entre économies d’énergie et sentiment d’insécurité, les habitants cherchent un compromis. Une pétition populaire appelle à rétablir l’éclairage nocturne dans toute la ville.
Éclairage public : Bordeaux entre économies d’énergie et sécurité des habitants
Depuis deux ans, Bordeaux applique une réduction significative de son éclairage public nocturne. Afin de réaliser des économies d’énergie, 57 % de l’éclairage urbain est éteint entre 01h00 et 05h00, sauf dans l’hyper-centre. Cette mesure vise à économiser près d’un million d’euros par an, suite à la crise énergétique exacerbée par la guerre en Ukraine. Cependant, cette initiative, bien qu’efficace sur le plan financier, fait naître des inquiétudes chez certains Bordelais. Un sentiment d’insécurité grandissant s’installe, particulièrement parmi les femmes et les jeunes, ce qui a conduit à une pétition signée par près de 3.000 personnes, demandant un retour à un éclairage complet dans toute la ville.
L’angoisse face à l’obscurité
Le sentiment d’insécurité est omniprésent pour certains habitants qui déplorent l’extinction des lumières. Amaëlle Fontaine, la pétitionnaire bordelaise, évoque son propre ressenti : « Il n’y a rien de rassurant à prendre un grand axe éclairé pour s’engouffrer ensuite dans une petite ruelle résidentielle, c’est tout simplement l’angoisse », souligne cette sommelière de 33 ans qui rentre tard le soir. Elle dénonce l’inadéquation entre les économies d’énergie réalisées par la ville et l’absence de solutions sécuritaires pour les habitants. « Les économies que réalise la mairie, moi je ne les fais pas en prenant le taxi ! », s’exclame-t-elle, critiquant l’argument selon lequel l’extinction n’a pas impacté la délinquance.
En réponse à ces critiques, Laurent Guillemin, chargé de l’éclairage public à la mairie, assure que cette décision a été réfléchie et accompagnée d’études. « Si le maire Pierre Hurmic avait été inquiet pour la sécurité, il n’aurait jamais pris cette décision », rétorque-t-il. D’après lui, la majorité des piétons circulent dans les zones éclairées, en particulier dans le centre-ville, où l’éclairage est maintenu.
Des alternatives face à la montée des préoccupations
Face à la montée de ces préoccupations, plusieurs communes ont pris des mesures pour atténuer ce sentiment d’insécurité. À Eysines, une commune de 25.000 habitants de l’agglomération bordelaise, un système d’éclairage à la demande a été mis en place fin octobre. Ce dispositif permet aux habitants de déclencher l’éclairage des rues via une application mobile. Le projet a déjà séduit plus de 2.000 utilisateurs et a permis de réaliser une économie annuelle de 20.000 euros, tout en réduisant la durée de l’extinction des lumières à 23h30 au lieu de 01h00. « Cela permet d’éclairer les rues sans sacrifier les économies d’énergie », explique la maire d’Eysines, Christine Bost.
L’environnement aussi au cœur des priorités
Outre les économies d’énergie, la réduction de la pollution lumineuse est un autre objectif de la ville de Bordeaux. La mairie rappelle que cette initiative permet de réduire la lumière nocturne qui affecte la faune locale. Laurent Guillemin souligne l’importance de l’environnement et affirme que « la place laissée au vivant fait aussi partie de notre politique ». La réduction de la lumière la nuit, même si elle est perçue comme une contrainte par certains, s’inscrit donc dans une logique de durabilité. « Je préfère prendre soin de l’environnement et ne pas avoir de la lumière H24. C’est un effort entendable », conclut l’élu.
Une question de compromis
Si la mairie de Bordeaux persiste dans sa politique de sobriété énergétique, le débat autour de l’éclairage public met en lumière une division. Les citoyens, inquiets pour leur sécurité, réclament des mesures immédiates, tandis que les autorités locales insistent sur l’importance des économies et de la préservation de l’environnement. Un compromis semble nécessaire pour concilier sécurité et responsabilité écologique. À terme, Bordeaux prévoit le déploiement de lampadaires LED à détection de mouvement, mais cela ne sera pas effectif avant plusieurs années.