7 000 lits psychiatriques fermés : des parlementaires disent stop

Face à une psychiatrie française en crise, un rapport parlementaire demande un moratoire sur les fermetures de lits dans les hôpitaux publics. Tandis que la santé mentale des Français se dégrade, des mesures urgentes sont jugées indispensables pour renforcer un système saturé et répondre aux besoins croissants, notamment des plus jeunes.

Psychiatrie publique : l’appel à stopper les fermetures de lits

La psychiatrie française traverse une crise profonde, exacerbée par une demande en constante augmentation. Mercredi, les députées Nicole Dubré-Chirat (Renaissance) et Sandrine Rousseau (EELV) présentent un rapport alarmant sur la situation. Leur recommandation principale : cesser immédiatement les fermetures de lits dans les hôpitaux publics et lancer une politique de réouverture ciblée dans les territoires les plus touchés.

« Le gouvernement doit mettre un terme à la fermeture de lits d’hospitalisation à temps complet dans le secteur public », insistent-elles dans ce document adopté à l’unanimité par la commission des Affaires sociales. Elles envisagent de traduire ces propositions en une loi, à soumettre au Parlement d’ici le premier semestre 2025.

Une santé mentale en déclin depuis le Covid

Les données mettent en lumière une détérioration préoccupante de la santé mentale en France, amplifiée par la pandémie de Covid-19. Chez les 18-24 ans, la prévalence des épisodes dépressifs est passée de 11,7 % en 2019 à 20,8 % en 2023.

Les jeunes filles sont particulièrement vulnérables. Les hospitalisations liées à des gestes auto-infligés (tentatives de suicide et auto-agressions) chez les 10-19 ans ont plus que doublé depuis 2020. « Le Covid a aggravé des phénomènes déjà existants », analyse Sandrine Rousseau.

Cependant, le système psychiatrique peine à répondre à cette demande croissante. Entre 2019 et 2023, la part des nouveaux patients pris en charge a chuté de 8 %, alors que le recours aux urgences psychiatriques continue d’augmenter. Cette inadéquation des soins crée des situations critiques : « Il y a des services d’urgences où des patients restent sous contention pendant 10 ou 15 jours faute de trouver un lit », alerte Nicole Dubré-Chirat.

Un système déséquilibré au profit du privé

Entre 2008 et 2022, la psychiatrie publique a perdu 7 000 lits, pour n’en compter que 58 568 aujourd’hui. Dans le même temps, le secteur privé lucratif en a gagné 3 664.

Cette redistribution met en lumière un déséquilibre structurel. Le privé se concentre sur des troubles spécifiques comme la dépression sévère, attiré par une rentabilité proche de 9 %. Pendant ce temps, le public doit gérer les cas lourds, les urgences psychiatriques et les pathologies complexes.

Pour corriger ces inégalités, le rapport propose d’imposer des obligations au secteur privé : assurer des permanences de soins les nuits, week-ends et jours fériés, et réserver un quota de lits aux patients en sortie d’urgences psychiatriques.

Des jeunes laissés sans prise en charge

La situation de la pédopsychiatrie est décrite comme « sinistrée » par les deux députées. Elles citent l’exemple du CHU de Nantes : en 2023, 123 enfants de moins de 15 ans, ayant des idées suicidaires ou ayant tenté de se suicider, n’ont pas pu être hospitalisés. Faute de place, ils ont été renvoyés chez eux, malgré des recommandations médicales pour une hospitalisation urgente.

Renforcer les soins de proximité et l’hospitalisation d’urgence
Pour répondre à ces défis, le rapport propose des solutions concrètes :

  • Développer les centres médico-psychologiques (CMP), qui représentent le premier niveau de soins psychiatriques.
  • Former les médecins généralistes pour qu’ils puissent mieux détecter et orienter les patients en souffrance mentale.
  • Créer des lits d’hospitalisation adaptés dans les services d’urgences, permettant des prises en charge de courte durée pour les crises psychiatriques.

Ces mesures visent à désengorger les structures saturées tout en offrant des alternatives adaptées aux besoins spécifiques des patients.

Un cri d’alarme pour une refonte du système

Au-delà des recommandations immédiates, Nicole Dubré-Chirat et Sandrine Rousseau appellent à une réflexion globale sur l’avenir de la psychiatrie française. La saturation du système, combinée à la montée des besoins, nécessite une stratégie ambitieuse pour reconstruire un dispositif capable de répondre à ces nouveaux défis.

 

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