Le marché du carbone devient un levier stratégique pour lutter contre la déforestation en Amazonie, mais son efficacité soulève des interrogations. En misant sur des projets de reforestation, de jeunes entreprises brésiliennes comme Mombak s’attèlent à compenser les émissions de CO2 des géants de la technologie et d’autres multinationales. Reste à savoir si ce modèle est durable et bénéfique pour l’environnement, mais aussi pour les communautés locales.
L’Amazonie, un terrain fertile pour le marché du carbone
La déforestation massive en Amazonie brésilienne est un enjeu majeur pour le climat. Cependant, cette forêt tropicale, qui joue un rôle clé dans l’absorption du CO2, devient aussi un terrain d’opportunités économiques grâce au marché du carbone. Un exemple frappant est celui de Mombak, une jeune entreprise brésilienne qui se spécialise dans la reforestation. Fondée en 2021, elle est désormais un acteur clé dans ce secteur, ayant déjà signé des contrats avec des géants tels que Microsoft et Google. Ces entreprises, dans l’objectif de compenser leurs émissions de gaz à effet de serre, investissent dans des projets de plantation d’arbres, permettant à Mombak de récolter des crédits carbone.
Une ambition écologique au service du climat global
Le marché du carbone repose sur un principe simple : des entreprises achètent des crédits qui correspondent à une quantité de CO2 absorbée par des projets comme la reforestation. L’Amazonie, avec ses vastes étendues de terres déboisées, devient un lieu stratégique pour ces projets. Gabriel Silva, cofondateur de Mombak, reconnaît cette opportunité comme un moyen d’aider les entreprises à atteindre leurs objectifs environnementaux, un défi de taille à l’échelle mondiale. Le but de Mombak est clair : planter 30 millions d’arbres d’ici 2032, sur une surface cinq fois plus grande que Manhattan, en reconstituant une forêt tropicale diversifiée.
Si les entreprises comme Microsoft compensent déjà des millions de tonnes de CO2 par ce biais, de nombreux observateurs pointent du doigt les limites de ce système. En effet, certains projets de reforestation ont montré leur inefficacité, notamment lorsqu’ils reposent sur des plantations de monoculture. Le greenwashing, ou écoblanchiment, reste un risque majeur : il s’agit de compenser des émissions sans vraiment réduire l’empreinte carbone des entreprises.
Les défis du marché carbone en Amazonie : Une gestion fragile de la terre
La question foncière reste un point crucial. En Amazonie, de nombreuses terres sont exploitées de manière informelle, ce qui engendre des conflits avec les communautés locales. Le marché du carbone, bien que porteur de solutions, peut aussi alimenter ces tensions. Les entreprises comme Mombak cherchent à éviter ce piège en rachetant des terres privées, mais la problématique de la gestion des terres publiques reste complexe. En effet, la reforestation ne doit pas se faire au détriment des peuples indigènes, qui dépendent directement de ces ressources naturelles. Selon des experts, il est impératif de s’assurer que les bénéfices de ces projets profitent aux populations locales et qu’elles ne soient pas exclues de la gestion de ces terres.
Le gouvernement brésilien envisage des concessions de terres publiques pour soutenir les projets de reforestation. Cependant, cette approche pourrait avoir des conséquences sur les droits des communautés amazoniennes, qui connaissent bien les dynamiques écologiques de la région. Les experts appellent à une collaboration avec ces communautés pour que le modèle de marché carbone soit véritablement bénéfique à long terme.
Une confiance fragile dans le modèle carbone
Si Mombak et d’autres entreprises parviennent à redresser la barre grâce à un modèle de reforestation diversifiée et fondée sur des espèces locales, il reste encore de nombreux obstacles. Les méthodologies de certification des crédits carbone doivent être rigoureusement contrôlées pour garantir que chaque arbre planté contribue réellement à la réduction des émissions. Le programme Verra, par exemple, doit renforcer ses critères pour éviter les scandales passés, où des projets étaient jugés inefficaces. Mais la mise en place de ces vérifications, ainsi que la recherche de financement, sont des défis de taille.
Ainsi, bien que l’Amazonie représente une opportunité majeure dans la lutte contre le réchauffement climatique, le succès du marché du carbone dépendra de sa gestion transparente, de la coopération avec les communautés locales et de la rigueur des méthodes de certification des crédits carbone. Il ne faut pas perdre de vue que ces projets, s’ils sont bien conduits, peuvent être une arme puissante pour restaurer la forêt et compenser les émissions de CO2, tout en soutenant l’économie locale. Mais à condition qu’ils ne deviennent pas une nouvelle source d’injustices sociales et environnementales.