L’Unesco vient de reconnaître les savoir-faire des couvreurs-zingueurs et des ornemanistes parisiens en inscrivant leurs compétences au patrimoine culturel immatériel. Un hommage à ces artisans essentiels pour la ville de Paris, qui jouent aujourd’hui un rôle crucial dans l’adaptation de la capitale face au changement climatique.
Une reconnaissance historique des artisans parisiens
Mercredi, l’Unesco inscrit officiellement les savoir-faire des couvreurs-zingueurs et ornemanistes à son patrimoine culturel immatériel. Cette décision marque une étape importante pour ces métiers qui façonnent les toits de Paris depuis plus d’un siècle. Les couvreurs-zingueurs, dont le nom dérive du métal utilisé pour couvrir 80% des toitures de la capitale, et les ornemanistes, responsables de la décoration, sont aujourd’hui reconnus pour leur contribution à la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame et leur rôle majeur dans l’adaptation au changement climatique.
L’inscription à l’Unesco intervient après plusieurs années de démarches. « Cette candidature, je l’ai toujours vue comme la valorisation d’un patrimoine qui se projette dans l’avenir », se réjouit Delphine Bürkli, maire du 9e arrondissement de Paris. Elle précise : « Paris sans ses toits, c’est Paris sans sa tour Eiffel. » Cette reconnaissance internationale met en lumière des métiers souvent invisibles, réalisés à grande hauteur, et pourtant essentiels au visage de Paris.
Un défi de visibilité pour une profession méconnue
Les savoir-faire des couvreurs-zingueurs, bien que vitaux pour la ville, sont encore largement inconnus du grand public. « Le problème de ce métier, c’est qu’il est sur les toits, donc il n’est pas connu car dans la rue, on ne les voit pas », explique Mériadec Aulanier, délégué général du Syndicat des entreprises de génie climatique et couverture plomberie. Cette inscription vise à mettre en lumière cette profession qui peine à attirer de jeunes talents. Actuellement, entre 5 000 et 6 000 couvreurs exercent à Paris, mais le secteur souffre d’une pénurie de main-d’œuvre.
« En accroissant la visibilité de la profession, l’inscription de ces savoir-faire contribuera à renforcer son attractivité », déclare Rachida Dati, ministre de la Culture. Avec plus de 500 postes vacants dans la capitale, l’inscription à l’Unesco pourrait offrir une bouffée d’air frais en attirant de jeunes apprentis, essentiels pour la pérennité de ces métiers. La reconnaissance internationale, pour ces artisans, revêt également une dimension symbolique forte. « Il y a une fierté pour eux de se dire que leur métier va être reconnu internationalement », affirme Gilles Mermet, photographe ambassadeur des toits de Paris.
Adaptation au changement climatique : un défi de taille
Les couvreurs-zingueurs sont désormais confrontés à un défi de taille : s’adapter aux exigences du changement climatique tout en préservant l’esthétique et le patrimoine de Paris. « Les toits sont à l’avant-poste du changement climatique, car leur adaptation se met en confrontation avec l’esthétique et le patrimoine », souligne Alexandre Florentin, conseiller du groupe écologiste à la mairie de Paris. Les toitures, plus claires, réfléchissent mieux la lumière, contribuant à limiter l’absorption de la chaleur. Pourtant, un rapport de l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) de 2022 indique que plus de la moitié des toits parisiens possèdent un albédo clair, ce qui les rend plus efficaces face à la chaleur.
Lors des canicules, les chambres sous les toits, jadis réservées aux domestiques, deviennent des « bouilloires thermiques ». Cette situation met en lumière les enjeux de la rénovation thermique des bâtiments. Les couvreurs, comparés à des « haute-couture » de la construction, doivent aujourd’hui faire face à des conditions de travail extrêmes. « Le couvreur est le premier à ressentir les effets du changement climatique », précise Mériadec Aulanier, soulignant l’importance de leur expertise dans l’adaptation des bâtiments.
Les solutions proposées sont nombreuses et incluent l’isolation des toits, l’installation de stores extérieurs ou la pose de végétation. « Mais à 45°C, il faut changer les tissus », explique Alexandre Florentin, qui plaide pour des états généraux sur le patrimoine et son adaptation au changement climatique. La profession a toujours su s’adapter, mais les défis sont immenses.
La canopée urbaine de Paris à l’honneur
Delphine Bürkli, pour sa part, insiste sur l’importance de la « canopée urbaine » de Paris, une structure vivante qui doit aujourd’hui être préservée et rénovée. La reconnaissance de ces métiers par l’Unesco n’est pas seulement une célébration du passé, mais aussi un enjeu d’avenir pour Paris. « Tous les défis sont devant nous », conclut-elle, soulignant la nécessité de continuer à soutenir ces métiers traditionnels tout en intégrant les enjeux contemporains du changement climatique