Diminuer l’empreinte carbone des élevages bovins, gros émetteurs de gaz à effet de serre, c’est faisable : une expérience menée dans une ferme de la chambre d’agriculture de Bretagne a permis de réduire ces émissions de 15%.
Une baisse grâce à une meilleure alimentation des animaux
« En trois ans, l’empreinte carbone (…) a été réduite de 15% », se félicite le président de la Chambre d’agriculture du Finistère Jean-Hervé Caugant. Il a aussi présenté l’étude menée à la ferme expérimentale de Trévarez à Saint-Goazec (Finistère).
On obtient ce résultat en jouant sur plusieurs leviers : l’alimentation des animaux, la gestion du troupeau ainsi que l’utilisation des 130 hectares de surface agricole utile (SAU) de l’exploitation.
Contrairement aux vaches qui passent leur vie à l’étable, à Trévarez, « les vaches sont dehors sept mois de l’année » et broutent l’herbe en prairies, explique Elodie Tranvoiz, ingénieure agronome chargée de recherche en production laitière à la chambre régionale d’agriculture.
Limiter le nombre d’animaux improductifs
À l’étable, l’hiver, elles sont nourries principalement avec de l’herbe et du maïs ensilés à la belle saison. Elles consomment aussi du tourteau de colza, produit en France, contrairement au tourteau de soja, le plus souvent OGM, produit sur le continent américain et massivement importé en Bretagne pour l’alimentation animale. « Entre la déforestation et le transport, le soja a un poids carbone important », relève Elodie Tranvoiz.
En ce qui concerne la gestion du troupeau, il s’agit de limiter le nombre d’animaux improductifs tout en assurant un renouvellement du cheptel. Pour se rapprocher au maximum de la majorité des exploitations laitières, celui-ci est composé de 125 vaches prim’holstein, la race laitière actuellement la plus répandue en système de production conventionnel.
Pour ce qui est des terres, mis à part les quelques 80 hectares de prairies et les haies qui stockent le carbone et favorisent la biodiversité, « on a travaillé, souligne l’agronome, sur nos rotations », c’est-à-dire le fait d’alterner les cultures selon les années dans les champs et ce, dans un ordre donné, afin de ne pas épuiser la terre et obtenir une meilleure productivité.
En France, l’agriculture représente « 19% des GES »
Abaisser les émissions de GES en agriculture est un impératif dans la lutte pour la préservation du climat. « En France, l’agriculture compte pour 19% des émissions de gaz à effet de serre et l’élevage y contribue à 49% », selon l’Institut national pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae).
Figure parmi les principaux GES émis par les bovins : le méthane. Il est produit « au moment de la respiration » et de la digestion. Recourir, par exemple, à des additifs naturels, permettrait de « réduire le méthane émis par les ruminants, mais on n’arrivera jamais à 0% d’émission », observe Elodie Tranvoiz.
Au-delà d’une réduction des émissions de GES, l’expérience menée à Trévarez présente aussi un autre avantage : les résultats économiques s’avèrent meilleurs que dans une exploitation laitière classique car les dépenses sont moins importantes, qu’il s’agisse du coût de l’alimentation ou des frais liés aux soins du troupeau.
Baisse des coûts de production
Par exemple, à Trévarez, le coût alimentaire est de 80 euros pour produire 1000 litres de lait, contre une moyenne nationale de 97 euros, selon les chiffres d’Inosys, le dispositif de références des chambres d’agriculture. Pour ce qui est du coût de l’engrais, il est de 31 euros par ha, contre 53 en moyenne.
Sur les trois années d’expérimentation, la ferme a maintenu son niveau de production (900.000 litres/an) mais la marge s’est accrue, car « le coût de production du lait est très inférieur » à ce qu’il était auparavant, constate la chargée de recherche.
La neutralité carbone pour 2027
Après avoir travaillé depuis 2012 « dans un système productiviste avec maïs (pour nourrir les vaches, NDLR) et recherche de performance technique par le volume de lait produit », Anne et Jean-Marc Le Vourc’h ont eux aussi « réintégré l’herbe dans les rations des vaches ».
« Aujourd’hui, les vaches pâturent ». Avec cette évolution, eux ont connu une baisse de production, mais « on n’a jamais aussi bien gagné notre vie et on n’a jamais été aussi bien dans notre tête » témoigne le couple, installé à Plounévez-Lochrist (Finistère). Prochain objectif de la ferme expérimentale : mener Trévarez à la neutralité carbone en 2027.