Entreprises à mission : quel bilan cinq ans après la loi Pacte ?

Cinq ans après l’adoption de la loi Pacte en mai 2019, plus de 1.600 entreprises en France se sont définies comme « entreprises à mission ». Ce statut unique intègre des objectifs sociaux et environnementaux dans les statuts des entreprises, au-delà de la recherche de profit. Jeudi, la communauté de ces entreprises a annoncé ce résultat, soulignant l’importance croissante de cette transformation.

Une croissance exponentielle

Le nombre d’entreprises adoptant le statut d’entreprise à mission a augmenté de manière impressionnante chaque année. Valérie Brisac, responsable régionale des laboratoires Boiron et directrice générale de la Communauté des entreprises à mission, a révélé lors d’un congrès à Paris que ces entreprises représentent désormais un million de salariés. Cette croissance est significative lorsqu’on considère qu’en décembre 2021, l’Observatoire des Sociétés à Mission avait recensé seulement 505 entreprises.

La loi Pacte, introduite en mai 2019, a été un catalyseur pour les entreprises cherchant à formaliser leur engagement envers des objectifs sociaux et environnementaux. Le statut d’entreprise à mission permet aux sociétés d’intégrer ces objectifs directement dans leurs statuts, en plus de leur but lucratif. Cette transformation permet aux entreprises de prendre des décisions qui favorisent à la fois la rentabilité et le bien-être social et environnemental.

Des décisions impactantes pour aligner les pratiques

Les entreprises à mission ne se contentent pas de rechercher le profit ; elles intègrent des objectifs sociaux et environnementaux dans leur fonctionnement quotidien. Lors d’une table ronde, Julien Denormandie, ancien ministre de l’Agriculture et actuellement chargé des questions d’impact chez Sweep, a déclaré que « les entreprises à mission doivent devenir la norme et pas une niche ». Cette déclaration souligne l’ambition de voir ce modèle devenir courant dans le monde des affaires.

Une consultation menée par la Communauté des entreprises à mission a révélé que 55% des entreprises à mission ont dû renoncer à certains produits ou services, ou à des relations avec certains clients ou fournisseurs, en raison de leur statut. Ces renoncements montrent que les entreprises prennent des décisions significatives pour aligner leurs pratiques avec leurs objectifs de mission. Par exemple, une entreprise pourrait choisir de ne pas vendre un produit ayant un impact environnemental négatif, même si cela réduit ses profits à court terme.

Diversité des entreprises adoptant le statut

Bien que la majorité des entreprises à mission soient des petites et moyennes entreprises (PME), 6% des grandes sociétés ont également adopté ce statut. Cela montre que l’engagement envers des objectifs sociaux et environnementaux transcende la taille des entreprises et peut être intégré dans différents types de structures. Cette diversité est essentielle pour démontrer que le modèle d’entreprise à mission est adaptable et applicable à diverses organisations, indépendamment de leur taille ou de leur secteur.

Le congrès à la Maison de la Mutualité à Paris a été l’occasion de faire un point d’étape, avec des parcours de dirigeants illustrant les succès et les défis rencontrés. Hélène Bernicot, directrice générale du Crédit Mutuel Arkéa et co-présidente de la Communauté des Entreprises à Mission, a exprimé l’espoir de voir le nombre de ces entreprises atteindre 10.000 en France d’ici 2027. Elle a également souligné l’importance de développer ce modèle à l’échelle européenne, mentionnant que « plus de 80% des répondants souhaitent la mise en place de ce modèle à l’échelle européenne ».

L’attractivité et les défis de la transparence

Le statut d’entreprise à mission est également vanté pour son attractivité, notamment pour attirer des talents. Paola Fabiani, dirigeante de Wisecom, a affirmé : « Je n’ai jamais séparé performances financières et objet RSE » (responsabilité sociale et environnementale). Cette intégration de la RSE dans les performances globales de l’entreprise est un atout majeur pour attirer et retenir les talents dans un marché du travail de plus en plus compétitif. Les employés sont de plus en plus à la recherche d’entreprises alignées avec leurs valeurs personnelles et qui démontrent un engagement concret envers des causes sociales et environnementales.

Cependant, malgré les progrès réalisés, des défis subsistent, notamment en matière de transparence. Bien que les entreprises à mission soient tenues de publier un avis d’audit sur le suivi de leurs missions, moins d’un quart le font, selon un recensement publié en avril par la Machine à sens. Ce recensement, portant sur 537 entreprises, souligne la nécessité d’améliorer la conformité et la transparence dans ce domaine. Pour que le statut d’entreprise à mission maintienne sa crédibilité et continue à attirer de nouvelles entreprises, il est essentiel que les entreprises respectent leurs engagements en matière de transparence.

Vers une expansion européenne

Le mouvement des entreprises à mission ne se limite pas à la France. Hélène Bernicot a exprimé l’espoir de voir une directive européenne émerger dans les prochaines années pour promouvoir ce modèle à travers le continent. Selon la consultation menée par la Communauté des entreprises à mission, plus de 80% des répondants souhaitent la mise en place de ce modèle à l’échelle européenne. Une harmonisation à l’échelle européenne pourrait non seulement renforcer l’impact de ces entreprises, mais aussi créer un cadre réglementaire plus cohérent et favorable au développement des entreprises à mission.

Le statut d’entreprise à mission, introduit par la loi Pacte, a connu une croissance significative en cinq ans, avec plus de 1.600 entreprises adoptant ce modèle. En intégrant des objectifs sociaux et environnementaux dans leurs statuts, ces entreprises montrent la voie vers un avenir où la recherche de profit et la responsabilité sociétale vont de pair. Cependant, pour que ce modèle devienne véritablement la norme, des efforts continus en matière de transparence et de conformité sont nécessaires. Le développement de ce modèle à l’échelle européenne pourrait également renforcer son impact et son adoption, créant ainsi un cadre propice à la croissance durable et responsable des entreprises.

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