L’Unesco utilise l’ADN environnemental pour dresser une cartographie des espèces marines et identifier celles les plus menacées par le réchauffement climatique. Cette méthode innovante repose sur l’analyse de traces d’ADN laissées dans l’eau, permettant de recenser un grand nombre d’espèces en un temps record. Plus rapide et moins intrusive que les méthodes traditionnelles, elle permet de repérer efficacement les zones marines nécessitant une protection immédiate. Grâce à cette technique, l’Unesco peut désormais agir plus rapidement pour préserver la biodiversité marine, un enjeu crucial face à l’impact croissant du changement climatique.
L’Unesco lance la cartographie des espèces marines grâce à l’ADN environnemental
L’Unesco a récemment dévoilé les résultats de sa première cartographie des espèces marines, réalisée avec l’ADN environnemental (ADNe). Ce programme, lancé en décembre 2021, marque une avancée majeure dans la protection des océans et de leur biodiversité. « Il permet de voir quelles espèces marines sont les plus menacées par le réchauffement climatique », explique Ward Appeltans, chef du système d’information sur la biodiversité des océans à l’Unesco.
L’ADNe, une méthode relativement nouvelle, consiste à prélever environ 1,5 litre d’eau de mer et à analyser les traces d’ADN laissées par les espèces marines. Bien que cette technique ait été développée dans les années 2000, elle commence seulement à être utilisée à grande échelle. Dans le cadre de ce programme, l’Unesco a déployé l’ADNe dans 21 aires marines protégées, notamment au Costa Rica, au Bangladesh, et aux Philippines.
4 500 espèces recensées, dont 120 menacées
Grâce à cette approche innovante, l’Unesco a pu identifier un impressionnant nombre d’espèces marines : 4 500 au total. Parmi elles, 120 figurent sur la liste rouge des espèces menacées de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Ce recensement massif permet de mieux comprendre la répartition et la situation de ces espèces à l’échelle mondiale. « Sans cette technique, cela aurait pris au moins cinq ans de travail et cela aurait été plus intrusif », souligne Audrey Azoulay, directrice générale de l’Unesco. « Cela permet d’identifier les zones à protéger en priorité », ajoute-t-elle.
Cette avancée est particulièrement significative dans le contexte du réchauffement climatique, qui menace la biodiversité marine à une échelle sans précédent. Le réchauffement des océans et l’acidification de l’eau mettent en danger de nombreuses espèces marines, dont certaines sont cruciales pour l’équilibre des écosystèmes marins. L’ADNe, en permettant de recenser rapidement et de manière non invasive ces espèces en danger, constitue une solution efficace pour agir rapidement avant qu’il ne soit trop tard. Ainsi, cette méthode de suivi constitue une véritable révolution dans les efforts mondiaux pour protéger la biodiversité marine. Grâce à l’ADNe, il devient possible de cibler les efforts de conservation avec une précision accrue, augmentant ainsi les chances de succès pour la préservation des espèces menacées.
Une méthode rapide et accessible pour protéger les océans
L’ADNe présente un autre atout majeur : sa rapidité et son faible coût. Les résultats peuvent être obtenus en quelques mois, contre cinq à dix ans avec les méthodes traditionnelles de recensement des espèces marines. Le programme a également permis de rendre cette technologie accessible à de nombreuses régions du monde. « Cela peut être mis en place aussi bien au Bangladesh, avec moins de ressources, qu’en Australie ou aux États-Unis », explique Fanny Douvere, cheffe du Programme marin du patrimoine mondial de l’Unesco. Le coût d’un kit de prélèvement s’élève à seulement 25 euros, ce qui permet à de nombreux pays de participer à cette initiative.
Pour sensibiliser les jeunes générations à la préservation de l’environnement, l’Unesco a impliqué des écoliers et leurs enseignants dans le processus de collecte de l’ADNe. Dans le parc national des Everglades, en Floride, des lycéens ont participé activement à l’identification des espèces invasives, comme les pythons, en utilisant cette méthode.
Un outil clé pour atteindre les objectifs de protection des océans
L’Unesco espère que l’ADNe jouera un rôle crucial dans la réalisation des objectifs fixés lors de l’accord de Kunming-Montréal en 2022. Cet accord vise à protéger 30 % des océans d’ici 2030, un objectif ambitieux face à la réalité actuelle où seuls 8 % des océans sont protégés. L’ADNe permet de déterminer rapidement les zones marines les plus vulnérables et de mettre en place des mesures de conservation plus ciblées.
Fanny Douvere, cheffe du programme marin, explique : « Nous voulons aider les pays à comprendre les changements causés par le réchauffement climatique pour qu’ils puissent améliorer la protection des espèces marines. » Grâce à cette nouvelle technologie, l’Unesco prévoit de déployer l’échantillonnage de l’ADNe dans les 18 000 zones marines protégées du monde entier.