Réchauffement : le seuil de 1,5 °C atteint en 2024

En 2024, la température mondiale dépasse pour la première fois les 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle. Si ce pic ne signifie pas que la cible de l’accord de Paris est atteinte de façon permanente, il souligne l’urgence de renforcer l’action climatique et de comprendre les dynamiques derrière ce réchauffement inédit.

2024 : Une année record de chaleur mondiale

Le service européen Copernicus et d’autres centres de surveillance climatique confirment que 2024 est l’année la plus chaude jamais enregistrée. La température moyenne mondiale a excédé de peu 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle, franchissant un seuil symbolique fixé par l’accord de Paris. Cependant, cet excès, observé sur une seule année, ne signifie pas que l’objectif de l’accord est définitivement dépassé. Les experts, comme ceux du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), insistent sur l’importance d’évaluer ces changements sur des périodes de dix ans pour juger des tendances à long terme.

Les fluctuations climatiques annuelles sont influencées par divers facteurs, notamment les oscillations naturelles comme El Niño ou La Niña. Ces phénomènes, combinés à d’autres dynamiques, expliquent en partie le pic de température de 2024.

Comment mesure-t-on l’évolution climatique ?

L’accord de Paris engage les pays à maintenir le réchauffement bien en dessous de 2 °C, avec un objectif ambitieux de 1,5 °C. Pourtant, il ne précise pas de méthode unique pour mesurer ces progrès. L’Organisation météorologique mondiale (OMM) compile les données de six grands centres de recherche internationaux, dont Copernicus (Europe), la NOAA et la NASA (États-Unis), ainsi que des institutions japonaises et britanniques. Ces données, couplées à des modèles climatiques, permettent de suivre l’évolution des températures sur le long terme.

Le GIEC recommande d’utiliser des moyennes décennales pour évaluer les tendances réelles du réchauffement. Selon cette méthodologie, les températures augmentent d’environ 0,2 °C par décennie depuis 1970, avec une accélération observée ces dernières années. Cette tendance suggère que la barre des 1,5 °C pourrait être durablement atteinte d’ici 2034, voire 2029 si l’accélération actuelle se maintient.

Les causes du pic de 2024 : au-delà des fluctuations naturelles

L’épisode El Niño de 2023-2024 a contribué au pic de chaleur, mais il n’est pas le seul responsable. D’autres facteurs entrent en jeu, notamment la diminution des émissions d’aérosols soufrés. Ces particules, bien que polluantes, avaient un effet refroidissant temporaire sur le climat. Leur réduction, due à des régulations renforcées dans le transport maritime et les centrales thermiques, a accentué le réchauffement.

Par ailleurs, les émissions de méthane, un gaz à effet de serre puissant, ont joué un rôle clé. Si les émissions humaines de méthane restent stables, la production naturelle s’intensifie, notamment dans les zones humides et à cause de la fonte du permafrost. Cette rétroaction climatique amplifie les effets du réchauffement. L’OMM souligne également l’affaiblissement des puits de carbone naturels, tels que les forêts et les sols, en raison de la sécheresse, des incendies et des maladies affectant les arbres.

Renforcer l’action climatique : des solutions à explorer

Bien que le dépassement des 1,5 °C en 2024 soit temporaire, il constitue un signal d’alarme. L’accélération des réductions d’émissions de CO₂ reste prioritaire, mais elle doit s’accompagner d’actions sur d’autres facteurs. Par exemple, réduire les émissions de méthane offrirait un effet de refroidissement rapide. Cette stratégie figure d’ailleurs dans le 6ᵉ rapport du GIEC, qui préconise une approche globale intégrant tous les polluants atmosphériques.

Les rétroactions climatiques, qui amplifient le réchauffement, nécessitent également une attention particulière. Protéger et renforcer les puits de carbone naturels passe par une adaptation des systèmes agricoles et forestiers. Ces efforts doivent garantir que ces écosystèmes résilients continuent d’absorber du carbone tout en résistant aux effets du changement climatique.

Leçons et priorités pour l’avenir

Le pic de température de 2024 nous rappelle que le combat contre le réchauffement climatique demande une mobilisation sans relâche. Si les objectifs de l’accord de Paris ne sont pas encore hors de portée, l’accélération des tendances récentes souligne l’urgence d’agir. Les stratégies d’atténuation doivent intégrer les dynamiques complexes des gaz à effet de serre, des rétroactions climatiques et des polluants. Chaque année compte dans la course contre le temps pour préserver un avenir viable.

Professeur d’économie, fondateur de la chaire « Économie du climat », Université Paris Dauphine – PSL

https://theconversation.com/1-5-c-en-plus-au-thermometre-en-2024-quelles-lecons-en-tirer-246738

AccueilNewsRéchauffement : le seuil de 1,5 °C atteint en 2024
D'autres publications