Une série de mesures face à la crise des soins de ville ont été annoncées par le Premier ministre Gabriel Attal, notamment l’augmentation de places en médecine. Fraîchement accueillies par les syndicats de médecins, certaines mesures font grincer des dents, comme une sanction de cinq euros pour les rendez-vous médicaux non honorés par les patients.
Les facultés de médecine devraient avoir 5 200 places de plus en 2027
Le chef du gouvernement affiche sa volonté de récupérer 15 à 20 millions de créneaux médicaux annuels, exprime-t-il dans un entretien accordé à la presse quotidienne régionale. D’après Matignon, il s’agit de « répondre au souci majeur des Français: la capacité de trouver un rendez-vous dans des délais acceptables » chez le médecin.
Pour se faire, le gouvernement va continuer d’élargir les entrées en facultés de médecine: le nombre de places en deuxième année passera de 10.800 en 2023 à 12.000 en 2025, puis 16.000 en 2027, annonce-t-il.
Mais remplacer l’ancien « numérus clausus » (places très limitées) par ce « numérus appertus » ne commencera à produire des effets sur la densité médicale qu’à partir de 2035.
En attendant, la stratégie du gouvernement vise donc à « reconquérir du temps médical ».
Mise en place d’une « taxe lapin »
Dans cette optique, les patients qui n’honorent pas leurs rendez-vous et annulent moins de 24 heures à l’avance auront droit à une sanction ou « taxe lapin », qui sera de 5 euros et sera directement versée dans la poche du médecin.
La somme pourra être retenue via l’empreinte bancaire par les plateformes de prise de rendez-vous ou par les soignants eux-mêmes. Mais le médecin concerné peut prendre la décision de ne pas l’appliquer s’il juge les raisons du patient valables. Cette mesure nécessite une loi, qui sera rapidement examinée par le Parlement, en vue d’une entrée en vigueur en 2025.
L’exécutif veut aussi « simplifier les procédures ». Il rassemble diverses mesures déjà annoncées qui doivent rapidement entrer en vigueur, comme la possibilité pour les pharmaciens de délivrer dès juin des antibiotiques pour les cistites et les angines.
Prévoir un « accès direct » aux spécialistes
« L’accès direct » aux masseurs-kinésithérapeutes va être « expérimenté » dans 13 départements, comme le prévoit la loi Rist, mais aussi l’accès direct à des médecins spécialistes, sans que le patient n’ait besoin de passer par un généraliste. Cette idée froisse déjà certains syndicats.
Autre « pilier » de l’accès aux soins: les gardes de soirs (18h00 à minuit) et weekends en cabinets de ville. Aujourd’hui, « 5% des territoires ne sont pas couverts », souligne Matignon.
Pour que « chaque français ait toujours un médecin de garde à moins de 30 minutes de chez lui », l’exécutif souhaite accorder une « aide financière » à tout médecin qui accepterait d’être temporairement « de garde » en dehors de sa zone.
Il souhaite aussi demander à d’autres soignants de participer, notamment les infirmiers, qui pourraient faire un « premier filtre », les sage-femmes, ou encore les dentistes. Mais le retour des « obligations de garde » n’est pas tout de suite au programme.
Le remboursement de « Mon soutien » psy passera de 30 à 50 euros
L’exécutif va enfin muscler son dispositif « Mon Soutien psy »: le montant de la consultation remboursée passera de 30 à 50 euros, avec désormais 12 consultations par an en accès direct. Ces annonces ont été fraichement accueillies par les syndicats.
Elles « arrivent à brûle pourpoint, au moment même où on est en train de négocier avec l’Assurance maladie, justement pour améliorer l’accès aux soins », déplore la présidente du premier syndicat de généralistes, MG France, Agnès Giannotti. Cela vient « déconstruire » notre travail, lance-t-elle, et estime que l’accès direct aux spécialistes, « ne règlera rien » puisque ces professionnels manquent partout.
Les négociations conventionnelles, interrompues avec fracas l’année dernière et reprises à l’automne, visent à revaloriser les médecins en contrepartie d’engagements sur l’accès aux soins. Ces directives ont été de nouveau suspendues cette semaine, en raison d’une fronde des médecins spécialistes.
Les rendez-vous psy mieux remboursés que ceux du médecin généraliste
Certaines annonces « sont hallucinantes, on est très en colère », critique aussi Franck Devulder, président du syndicat CSMF, « choqué » par l’idée « d’accès direct à des psychologues à 50 euros », alors que les autorités ne proposent que « 30 euros » pour la consultation de base des généralistes. Il déplore diverses délégations de tâche à des professionnels « dont ce n’est pas le métier ».
« Au prétexte de simplification, on court-circuite tout, en écartant les médecins » et « au mépris de la qualité », juge-t-il. Il se réjoui toutefois « qu’enfin », un gouvernement propose aux praticiens de prélever une « taxe lapin ».