Tri des biodéchets : inefficace et sans sanctions pour la plupart des Français

Depuis ce début d’année, les déchets alimentaires ne doivent plus être jetés à la poubelle. Pourtant cette obligation européenne restera encore très théorique durant de longs mois pour une majorité de Français, en raison du manque de solutions locales pour la collecte séparée de leurs biodéchets.

Seuls 40% de la population auront accès au porte-à-porte

« Moins d’un Français sur trois aura effectivement accès à une solution de tri à la source dans sa collectivité », regrette l’ONG Zero Waste Europe.

En conséquence, le ministère de la Transition écologique ne cache pas que seuls 40% de la population, soient 27 millions de Français, auraient une solution en 2024 : une collecte porte-à-porte. C’est-à-dire un point d’apport volontaire proche de chez soi, ou la mise à disposition, sur la base du volontariat, d’un bac de compostage.

« Cette obligation est connue depuis 2015 ! », rappelle Zero Waste Europe, dénonçant « un retard inacceptable » qui selon elle « traduit un manque de volonté politique des collectivités locales comme de l’Etat ».

500 nouveaux bacs à biodéchets dans les rues de Paris d’ici fin 2024

A Paris, la capitale a expérimenté la collecte dans les immeubles comme à Milan où cela fonctionne bien. Mais la ville est déçue par la faible utilisation du dispositif. A la place, elle installera environ 500 nouveaux bacs à biodéchets dans les rues d’ici fin 2024. Les Parisiens devront y apporter leurs épluchures et restes alimentaires, en espérant qu’ils n’y jetteront pas d’autre types de déchets.

Pas de changements immédiats non plus pour les 1,9 million d’habitants de la deuxième métropole française, Aix-Marseille. Des points de collecte en extérieur existent déjà comme expérimentations, et en 2024 d’autres seront installés progressivement.

La métropole Lyonnaise entame les démarches dès 2021. Selon l’agglomération d’1,4 million d’habitants, des bornes de compostage ont été installées tous les 150 mètres, soit 1.300 en tout pour l’instant.

Des petites villes anticipent depuis longtemps

Des composteurs individuels en maison existent dans la communauté urbaine du Grand Besançon, des bacs partagés pour les copropriétés et des chalets de compostage prévus pour des quartiers entiers, à l’accès réservé aux riverains munis d’un code. Dans l’hypercentre, une collecte par vélo cargo des seaux à biodéchets, expérimentée depuis 2022, doit être étendue à 15.000 riverains en 2024.

Par conséquent, les habitants de l’agglomération n’auront plus à sortir les poubelles d’ordures résiduelles (bac gris) qu’une fois tous les 15 jours.

Pas d’amende ni sanctions en cas de non-tri

Le gouvernement n’a pas souhaité se rallier à l’opinion publique perçue comme réticente, insistant pour dire qu’il n’y aurait pas d’amende en cas de non-tri. Il n’y aurait pas d’obligation d’avoir un seau à épluchures présent dans le milieu de la pièce.

Non contraignantes et tardives, les modalités d’application de la loi n’ont été publiées que début décembre. L’association d’élus Intercommunalités de France décrypte qu’un simple avis sans la portée d’un décret, « ne prévoit ni sanctions ni objectifs de résultat ».

Dans le texte, les collectivités ne sont même pas obligées de lancer une étude de préfiguration avant le 31 décembre, mais uniquement prouver qu’elles ont décidé de le faire.

Principal objectif : alléger les poubelles

Nos poubelles contiennent environ 30% de matière organique : pelures, coquilles d’oeuf, marc de café, restes de repas, parfois donnés aux poules ou aux chiens, ou compostés dans le jardin, mais le plus souvent jetés.

À Bruxelles, Milan ou Séoul, le tri des biodéchets est rentré dans les moeurs.

L’objectif est principalement d’alléger les poubelles et par ailleurs, cesser de brûler en incinérateur des déchets organiques contenant beaucoup d’eau, ou de les enfouir en décharge. Ces déchets peuvent être recyclés en compost pour le potager ou l’agriculture, ou en biogaz pour rouler ou se chauffer.

La commune de Pompey a adopté le dispositif il y a près de 30 ans

L’intercommunalité du bassin de Pompey (environ 40.000 habitants), a inauguré une plateforme de compostage dès 1999. La collecte en porte-à-porte touche deux tiers des habitants. « Pour nous, c’est rentable », ose Odile Bégorre-Maire, élue de Lay-Saint-Christophe (Meurthe-et-Moselle) après de 30 ans de recul.

Tout n’est pas parfait et « il y a encore 20% de biodéchets qui pourraient encore être éliminés du sac contenant les ordures ménagères résiduelles, et toujours 10% de lieux où les gens ne s’y mettent pas vraiment. Ils ont eu seulement 2 ou 3% de hausse de la taxe d’enlèvement des ordures depuis 2016, alors que, sinon, la taxe aurait grimpé de 25% », calcule-t-elle.

En cœur d’agglomération, des points d’apport volontaire ont été placés dans la rue dans un rayon de 100 à 150 mètres des habitations. Mais depuis janvier 2023, les éboueurs ne passent plus qu’une fois tous les 15 jours pour les ordures ménagères résiduelles. Pour les biodéchets et le recyclage, le ramassage a lieu chaque semaine.

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